NATHALIE LEMEL : UNE COMMUNARDE BRETONNE

Née à Brest en 1826, elle quitte Quimper où elle s'était installée avec son mari en 1849, pour débarquer à Paris en 1861.
Une fois à Paris, sortie du carcan provincial et religieux, elle est obligée par manque d'argent d'apprendre et d'exercer un métier, celui de relieuse. En août 1864, une grève longue et très dure est menée par les ouvriers relieurs de Paris; parmi eux, le militant Eugène Varlin. Nathalie est parmi les grévistes. Et, lorsque l'année suivante, une nouvelle grève sera décidée, elle sera du comité de grève et ensuite élue déléguée syndicale. Ce qui constituait une véritable révolution pour l'époque, dans le milieu ouvrier encore sous l'influence de Proudhon qui reléguait les femmes au foyer ou sur le trottoir.
Elle quitte le domicile conjugal en 1868, son mari s'étant mis à boire. Elle va alors pouvoir se consacrer plus intensément à ses activités militantes. Avec Varlin et quelques autres relieurs, elle crée une coopérative d'alimentation, la Ménagère, puis, à partir de 1868, une sorte de restaurant ouvrier, la Marmite. Elle y est caissière, secrétaire ; elle loge sur place pour être plus efficace. Cette idée de coopérative a un tel succès que trois autres restaurants s'ouvrent, regroupant environ 8 000 travailleurs.

Nathalie LEMEL va participer pleinement à la Commune de Paris. Déjà pendant le siège par les Prussiens, pendant ce terrible hiver 1870, elle avait tout fait pour distribuer à manger, préparer les repas dans les restaurants de la Marmite.
Mais le 18 mars, quand le drapeau rouge flotte sur l'hôtel de ville, elle va pouvoir oeuvrer de façon vraiment constructive. Les femmes ne sont pas éligibles à la Commune ! elles constituent leur structure à elles qui leur permettra de se regrouper, de débattre des problèmes du travail, d'ouvrir des ateliers.
Et c'est la création le 11 avril 1871 de l'Union des femmes, que Nathalie LEMEL a mise en place avec Elisabeth Dmitrieff et un groupe d'ouvrières. Des clubs sont créés où les femmes prennent une parole précise, énergique, très réaliste.
Le temps des barricades
Nathalie LEMEL, avec une centaine de femmes, se replie des Batignolles vers la place Blanche, puis vers la place Pigalle. Pendant des heures, elles font le coup de feu pour tenter d'arrêter l'assaillant versaillais. Un témoin dira : "Rentrant chez elle le 23 mai, les mains et les lèvres noires, couverte de poussière, elle disait avoir combattu 48 heures sans manger et elle ajoutait : "Nous sommes battus, mais non vaincus."
Devant le conseil de guerre, elle assume fièrement toutes les responsabilités de son action révolutionnaire, comme Louise Michel. Et toutes deux, condamnées à la déportation au bagne de Nouméa.

En 1880 c'est la loi d'amnistie
Les communards survivants retournent en France. Nathalie LEMEL, âgée, éprouvée par ses années de déportation, trouvera un emploi manuel dans l'imprimerie. Elle continuera à suivre les événements, à évoquer les grands jours de la Commune et à intervenir tout particulièrement pour défendre les conditions de travail des femmes. Elle meurt en 1921 à l’hospice d’Ivry-sur-Seine.

En 2007, une rue à Paris
À Paris, par délibération du 27 mars 2006 du conseil d'arrondissement, la décision a été prise de donner à une place du 3e arrondissement le nom de Nathalie LEMEL. Cette place, auparavant sans nom, a été inaugurée le 8 mars 2007 à l'occasion de la Journée internationale des Femmes. Elle se trouve à l'angle des rues Dupetit-Thouars et de la Corderie, qui abrita autrefois le siège de la Première Internationale.